2016 : la croissance molle sera hélas de retour
Les prévisions de croissance en France, pour 2015 et 2016, doivent être revues à la baisse à cause de facteurs internationaux. Pour les analystes, les temps sont trompeurs. Que penser des signaux contrastés qui alimentent les prévisions de croissance pour 2015 et 2016 ?
Selon plusieurs études récentes de l'Insee publiées mi-Octobre, le climat des affaires serait en voie d'amélioration. Ceci est en parfaite contradiction avec la révision à la baisse du taux de croissance, pour 2015, que les instituts privés viennent de rendre publics. Et que le Hollande François a repris lors de son entretien récent sur RTL.
(lien : http://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/021423517292-france-le-climat-des-affaires-au-plus-haut-depuis-quatre-ans-1168149.php
Lien : http://www.lesechos.fr/politique-societe/politique/021414345943-nous-pouvons-eviter-des-licenciements-a-air-france-estime-francois-hollande-1166940.php )
Au mieux, la France atteindra 1,1% de croissance pour 2015. Au pire, celle-ci pourrait n'être que de 0,9% selon plusieurs études internationales intégrant l'effet pétrole. Ce qui est un paramètre différent de l'amélioration ponctuelle et limitée des taux de marge qui demeurent encore nettement décrochés des niveaux allemands.
(lien :http://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/021347611932-france-linsee-conforte-le-scenario-dune-croissance-de-1-cette-annee-1158372.php?WbZWvQfUOBaAIiYo.99)
La désillusion
Dans ce mouvement indécis, il est à noter des faits incontestables confortés par une récente communication du Fonds monétaire international (FMI) à Lima : nous assistons à une évaporation de croissance dans plusieurs grandes zones économiques. Les Etats-Unis enregistrent un faux-plat. La Russie est en récession (PIB - 4%). La Chine décélère avec brutalité et se tourne davantage vers son marché intérieur. Plusieurs pays émergents entrent en récession, à l’image du Brésil dont le PIB devrait reculer de 3,8% en 2015. Ainsi, la croissance mondiale a été revue à la baisse et un consensus s'établit autour de 3% : le FMI étant récemment passé de 3,3% à 3,1%.
2015 sera donc l'année de la désillusion pour l’économie mondiale. La croissance, s'inscrit dans une perspective molle. Aucun grand ensemble économique ne tirant parti de la conjoncture, loin s'en faut.
En ce qui concerne la France, cette croissance molle attendue en 2015 devrait se reproduire en 2016. Ainsi, la croissance du PIB pourrait se cantonner autour de 1 % au lieu des 1,5% jugé « atteignable par le Haut Conseil des finances publiques (HCFP). La sémantique et le signifiant sous-jacent du terme " atteignable " montre en creux le scepticisme des membres de ce Haut Conseil. La révision à la baisse des prévisions qui s'impose s’explique par un moindre dynamisme allemand issu d'exportations moins vives et par le contre-choc global que traverse l'industrie automobile depuis l'affaire VW. Par ailleurs, le fait que l’Unedic ne prévoit qu’un recul du chômage de l’ordre de 51.000 demandeurs d’emplois en 2016 est un fort indice de l'atonie de la croissance selon la grille de lecture fournie par la loi d'Okun.
Celle-ci établit le seuil à partir duquel le niveau de croissance permet d'inverser la courbe du chômage : or, pour notre pays, les études lucides situent ce point d'inflexion à 1,7% de croissance du PIB. D'où l'hypothèse conservatrice de l'UNEDIC qui ne pourra hélas être tenue par l'emploi marchand et pose à nouveau la question de la proportion des emplois aidés.
Comme en octobre : http://www.lefigaro.fr/vox/economie/2015/10/27/31007-20151027ARTFIG00243-chomage-pourquoi-les-chiffres-sont-pieges.php
Au demeurant, plusieurs instituts privés ne prévoient pas de reprise de l'emploi en 2016. D'autres plus soumis à d'autres forces ou intérêts tentent de démontrer l'impossible...
Les trois sorcières
A Wall Street, les troisièmes vendredis de chaque mois sont surnommés les trois sorcières du fait de l'expiration de différentes options et contrats à terme. Face à cet événement technique, les marchés sont historiquement reconnus comme étant déstabilisés par l'énoncé des futures au terme mensuel ( ou autre ) suivant.
Or, trois sorcières matérialisent déjà un risque sévère de rechute de l'activité mondiale à l’horizon trois ans. D'une part, les pressions déflationnistes significatives en zone Euro et importantes au Japon. D'autre part, la faiblesse de l'investissement qui fait écrire au nouveau chef économiste du FMI, Maurice Obstfeld, que : « l’anticipation d’une faible croissance potentielle elle-même pèse sur la demande globale, ce qui freine davantage l’investissement : c’est un cercle vicieux. »
Enfin, le mécanisme incertain de « déversement » des liquidités issues de la politique monétaire accommodante (quantitative easing). Selon une représentation idéale, l'injection de liquidités par la Banque centrale européenne (BCE) devait permettre par verticalité d'abonder le système de crédit aux entreprises via un système bancaire performant. Ce qui est globalement vrai aux Etats-Unis ne l'est pas en Europe.
Nous demeurons en phase de « credit-crunch » (resserrement du crédit explicitement évoqué par le Gouverneur de la Banque de France en Juillet 2014 : intervention de Christian Noyer aux Rencontres d'Aix-en-Provence ) ) et les normes dites « Bâle III » de ratios prudentiels et d'autres facteurs n'incitent pas les banques à s'exposer. Ayant souffert de la chute de leurs cours boursiers, parfois d'amendes vertigineuses, confrontées à des exigences renforcées en fonds propres, préoccupées de la qualité des créances qu'elles détiennent dans leurs bilans, les banques sont fort logiquement des agents économiques en position d'expectative.
Madame Janet Yellen, la présidente de la Réserve fédérale (FED), ne saurait méconnaître les asymétries d'information ( Son mari étant l'éminent George Akerlof, concepteur du principe de sélection adverse ). En cas de remontée des taux de la FED, ceci serait récessif pour les émergents. Parallèlement face à la déflation qui plane sur l'Europe tel un maxi-drone, Mario Draghi risque d'être contraint d'engager un QE phase 2 encore plus vigoureux : ses propos d'Octobre à Malte nous y préparent. A horizon du mois de Décembre ?
Face aux trois sorcières, nous avons les seuls atouts du QE mais deux questions se posent : jusqu'où peut-on alourdir le bilan d'une banque centrale ? Comment sortirons-nous, " plus tard " de cette séquence inédite de QE ? (http://www.latribune.fr/opinions/tribunes/20150216trib5994f550b/comment-l-europe-sortira-t-elle-de-la-politique-de-quantitative-easing.html )
En clair, quel impact de cessation graduelle du QE sur la croissance ?
Le moment venu.