L'objet de ces quelques lignes est de vous faire part de notre vive émotion – de notre peine sincère – et de tenter d'apporter quelque soulagement à votre profond chagrin individuel et collectif.

Moins de quinze jours après son frère Christian ( avec lequel ma mère a travaillé pendant près de vingt ans dans sa passion pour l'édition ), la famille de Bartillat est soumise à l'épreuve.

Bien entendu, nous avions remarqué certaines gênes issues du nombre de Printemps de celui qui m'avait ordonné de l'appeler directement Armand mais nous n'aurions jamais pensé que son chemin vers l'Espérance serait aussi prompt.

Nos enfants et moi concevons la douleur de son épouse à qui nous présentons nos condoléances doublées de mes hommages respectueux.

Comme toujours, lorsque le départ est atteint, il revient des images et des sons : je voudrais prendre la liberté de vous en confier quelques uns.

Pour moi, Armand a toujours su manifester de la tendresse – pas seulement de l'affection – lors des épreuves que toute vie comporte. Il fût d'un rare secours lorsqu'une mauvaise tumeur devait me concerner en 2008, il fût d'une écoute attentive dans des histoires de divorce.

Qualités de tête et qualités de cœur se coalisaient vraiment chez cet homme.

Nous avons eu, en plus de vingt ans, bien des conversations que son épouse était à la limite de redouter car nous pouvions être de bons et authentiques bavards....

Nous parlions de l'immeuble car sa confiance me fit souvent représenter ses droits en Assemblée de copropriété. J'essayais d'être clair dans ces matières qui le lassaient mais qui nous donnèrent parfois l'occasion d'éclats de rire.

Nous parlions d'amis communs du Bourbonnais ( Durat, Régis de Chabannes, Soultrait ) et de la Nièvre. Je lui parlais de mes attaches dans le Morvan : pays qu'il redoutait pour son froid.

Sans être dénué de pudeur, il peut être écrit que le défunt aimait la chaleur et le soleil : certaines promenades au Parc Monceau – il y a déjà quelques années – en attestent.

Très récemment, il était avec nonchalance au coin de la rue à déguster un apéritif : on lui aurait donné vingt ans de moins tellement son sourire était présent à l'idée que nous allions passer une dizaine de minutes à refaire le monde.

De là où il est désormais, je suis convaincu que la chaleur et une belle lumière l'entourent. Peut-être parle-t-il avec Christian enfin libéré de ses terribles souffrances ?

Notre condition humaine ne peut répondre à cette importante question mais notre foi nous donne la conviction que cette possibilité n'est pas une hypothèse absurde.

Pour ma part, j'entends encore les conseils de l'estimé Armand et tente de les appliquer : face à mon énergie, il savait m'apprendre les vertus du temps et me parlait comme un oncle aux propos constructifs.

Son rappel à Dieu m'amènera à avoir une pensée silencieuse dans une de mes prières : cet homme qui n'était pas plié devant les curés – dont il se méfiait parfois à juste titre -était droit devant sa Foi.

Nous parlions souvent de mon goût pour les arbres et de mes promenades en forêt de Tronçais : dix secondes plus tard, nous reparlions d'histoires issues de la Mutuelle de l'Allier dont il fût un Président apprécié.

Oui, nos conversations étaient décousues mais elles structuraient une réelle estime réciproque et ma pleine loyauté.

Cet homme manquera, comme l'ombre d'un beau frêne, à notre immeuble où il était aimé par plusieurs de ses voisins.

Si je devais résumer les lignes que viens de vous confier : j'élèverais la voix pour vous dire : " Armand, vous me manquez tant. Déjà ".

Le temps fera son ouvrage mais des images seront toujours présentes. Des anecdotes de souliers britanniques de belle facture qu'il aimait à porter. Des souvenirs plus intimes.

Pour conclure notre propos, il me semble que fort logiquement votre famille a perdu un " pater familias " de beau gabarit. Quant à nous, ces amis, il est clair que nous n'aurons plus le bonheur de ces propos à bâtons rompus dignes d'un salon littéraire.

Tel un blason familial, cet homme d'une dimension emblématique est finalement facile à mémoriser : c'était un gentleman tourné vers l'essentiel. Avec l'expression de notre affection.